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Paris Match Septembre 2001
Paris Match. Avez-vous hésité avant d'accepter le rôle décoiffant de Jewel dans "Divine mais dangereuse" ?
Liv Tyler. Oui. J'avais des doutes. L'histoire et le rôle étaient si décalés. Et puis, je me suis rappelé..le tournage de "Cookie's Fortune". Un merveilleux souvenir. Pour deux raisons. Bob [Robert Altman] est un réalisateur génial et le film est une comédie. Je ne m'étais jamais sentie aussi libre et naturelle. A la fin du tournage, je me suis dit: "Ouah! il faut que je recommence cette expérience "' Tourner sans cesse dans des films dramatiques est éprouvant. Et puis, à Hollywood, il n'y a pas beaucoup de rôles pour les femmes. La plupart des scénarios reposent sur un personnage masculin qui a toujours le premier rôle. Le personnage féminin, lui, sert de faire-valoir. J'ai été à maintes reprises la jolie nana de service. Pour une fois, j'avais envie d'être au premier plan. .
P.M. Le film repose en effet sur vous et sur votre pouvoir de séduction. Quelle scène a été la plus difficile à jouer ?
L T.
Elles étaient toutes difficiles car Jewel est un rôle de composition. Nous avons des caractères opposés. C'est une manipulatrice. Elle ne me res- semble en rien et ne pourrait jamais être mon amie. La scène qui m'a mise le plus mal à l'aise ? Celle où je lave ma voiture, en prenant une pose lascive. De loin la séquence la plus torride.
P.M. Harald Zwart, le réalisateur, a tourné de nombreux films publicitaires, mais il signe auiourd'hui son premier long-métrage. Etait-ce pour vous un sujet d'inquiétude ?
L T.
il faut bien commencer quelque part. On m'a donné ma chance autrefois alors que je n'avais aucune expérience. C'était à mon tour de donner sa chance à quelqu'un. Dès que je l'ai rencontré, j'ai su qu'il était capable de faire du bon travail. J'attends avant tout d'un réalisateur qu'il soit honnête et sache ce qu'il veut. Sinon, c'est le chaos.
P.M. Dans le film, trois hommes, un barman, un avocat et un détective, tombent tour à tour amoureux de Jewel, qu'ils idéalisent. Vous est-il déjà arrivé d'idéaliser un homme ?
L T.
Je me souviens d'une scène dans "Onegin " où mon partenaire Ralph Fiennes me dit: "Tu m'attribues des qualités que je n'ai pas. Je ne suis pas celui que tu imagines." A l'époque, j'avais 18 ans. Cette phrase m'avait frappée car c'est une situation que j'avais moi-même vécue. Lorsque l'on tombe amoureux, on projette en l'autre ses propres désirs et un état de son âme. Plus tard, on se rend compte de sa méprise.
P.M. Jewel a tous les hommes à sa merci. A quel âge vous êtes-vous rendu compte du pouvoir que vous aviez sur les hommes ?
L.T.
Je n'ai pas soif de pouvoir.. Je n'essaie pas d'avoir le contrôle de qui que ce soit. A la différence deJewel,je ne manipule pas les hommes car je n'aime pas moi-même être manipulée. Mais si je flashe sur un homme,je suis prête à l'enjôler, à être uul peu plus séductrice que d'habitude pour arriver à mes fins.
P.M. Avez-vous été manipulée ?
L T.
C'est le propre de Hollywood. Souvent, on vous cache des choses, tout le monde n'est pas honnête avec vous. J'essaie de prendre tout cela à la légère, de garder mon sens de l'humour. Je n'ai pas le choix. Je compte sur l'honnêteté des gens, sur leur respect, mais je ne peux l'imposer.
P.M. Dans le film, vous avez plusieurs scènes aux côtés de Michael Douglas, qui joue un rôle de vieux ringard. Quel partenaire est-il ?
L. T. Michael est un vrai pro. il n'a aucun ego. il arrive le matin sur Ie tournage et fait son boulot. Point. C'est très agréable, car souvent les acteurs traînent tous leurs problèmes. Ce film est son "bébé", il l'a produit et y tient énormément. L'avoir parmi nous nous a tous beaucoup aidés.
P.M. On ne peut s'empêcher de sourire lors'qu'on le voit dans le film Coiffé avec une banane...
L. T. Un matin, je suis entrée dans la loge pour me faire maquiller et je l'ai vu assis devant la glace. Il m'a souri jusqu'aux oreilles.. Avec ses fausses dents, ses cheveux relevés au-dessus du front et sa chemise bariolée, il était irrésistible! Son accoutrement l'amusait beaucoup. il était aussi excité qu'un petit garçon.
P.M. Dans une scène, vous chargez un revolver et tirez à bout portant. Quel effet cela vousa.t.il fait ?
L. T..
C'est terrifiant de tenir un revolver ! C'est très lourd. Dans "Plunkett et MacLeane",j'en avais un également, mais je n'avais pas à le charger. Cela m!a fait un drôle d'effet ! On parle beaucoup du controle des armes à feu. Je ne comprends pas pourquoi aux Etats-Unis les gens ont le droit de posséder une arme à feu. Toutes ces tueries dans les écoles, ces deux dernières années... Personne ne semble se rendre compte de la gravité de la situation. En relatant ces tragédies, on encourage les mauvais instincts de certains gosses. Personnellement, je n'aimerais pas posséder un fusil. Cela ne me donnerait pas comme à certains une impression de sécurité.
P.M. On vous décrit souvent comme une femme-enfant. Etes-vous d'accord ?
L. T. Oui. C'est de famille. Mon père a une cinquantaine d'années et il est resté un enfant. Ma mère aussi. ils sont tous les deux pleins de vie, pas du tout blasés, toujours prêts à s'essayer à quelque chose de nouveau. il en est de même pour moi. Je m'enthousiasme facilement, comme une petite fille.
P.M. Vous avez abandonné vos études très tôt ?
L.T. C'est faux ! J'ai terminé mes études secondaires et j'ai obtenu mon diplôme. C'était très important pour moi. Lorsque j'ai fait mon premier film, on m'a demandé si je voulais me faire émanciper, arrêter mes études. J'ai répondu qu'il n'en était pas question. Résultat: je tournais toute la journée et, entre les prises de vue, j'allais travailler dans la salle de classe.
P.M. Avez-vous le sentiment que l'on vous a volé votre adolescence ?
L. T. Je n'ai pas eu une adolescence normale, j'ai grandi dans une famille très excentrique. Mais personne ne m'a empêchée de vivre comme je l'en- -tendais. Aujourd'hui, apres chaque toumage, je m'oblige à fajre un break.Je veux profiter de l'existence, être heureuse pour à mon tour rendre heureux mon fiancé [Royston Langdon, le bassiste du groupe Spacehog]. Récemment, j'ai rejoint deux amies en Espagne. Nous avons pris le ferry et sommes allées au Maroc. Ce n'était pas un voyage très glamour mais je ne l'oublierai pas. Les occasions sont rares. Lorsque je vais à l'étranger, c'est en général pour travailler.
P.M. Qui a eu le plus d'influence sur vous au cours de votre adolescence ?
L.T.
Tout le monde, j'imagine. Peut-être est-ce la raison pour laquelle je suis devenue comédienne. Il y avait tellement de gens différents autour de moi, avec des vies si diverses.
P.M. Votre mère, Bebe Buell, est une ex-chanteuse, ex -mannequin qui a posé autrefois pour "Playboy". Quel âge aviez-vus lorsque votre mère vous a pour la premièe fois parlé de sexualité ?
L.T.
Je ne me rappelle pas ma mere entrain de m'expliquer par le menu que les bébés ne naissent pas dans les choux. Mais le sujet n'était pas tabou. Bien au contraire. Elle m'interdisait de regarder des films violents à la télévision, mais pas des films érotiques.
P.M. Vous êtes la fille de Steven Tyler, le chanteur du groupe Aerosmith. Or jusqu'à l'âge de 10 ans votre mère vous a fait croire que Todd Rundgren, le chanteur du groupe Utopia, était votre père. Pourquoi ?
L.T.
Je ne sais pas, posez leur la question. Mes parents n'étaient plus ensemble lorsque je suis née. Ma mère vivait avec Todd et il a décidé de m'élever comme sa fille.. Chaque fois que l'on m'interviewe, on me pose cette question. J'en ai assez !
P.M. Dans quel milieu vous sentez-vous le plus à l'aise, celui du rock'n'roll ou celui de Hollywood ?
L.T.
Mon père et mon fiancé ont beau appartenir au milieu du rock'n'roll, moi je n'en fais pas partie. Et je continue à apprendre sur le monde du cinéma. Ces deux milieux sont si vastes que je m 'y perds. Je me sens mieux dans mon propre univers.
P.M. Vous occupez-vous de vous ?
L T.
J'ai du mal à me souvenir qu'il faut que je me détende..J'ai tendance à vouloir m'occuper des autres en premier, à regler tous leurs problèmes et à m'oublier. Mon métier est très éprouvant. Se réveiller à 5 heures du matin pour aller sur un tournage, être toujours en représentation, c'est difficile.
P.M. Savez-vous dire non ?
L T.
Je sais me fixer des limites, mais je n'en ai pas beaucoup.Tant que l'on ne me ment pas, que l'on n'abuse pas de ma crédulité,je suis de bonne volonté. Dans mon travail, j'entends.
P.M. Quels sont vos projets ?
L T.
Chercher une maison, m'occuper de mon fiancé et faire la promotion du "Seigneur des anneaux", le film que j'ai teminé à Noël. Il s'agit en réalité de trois films dont les sujets forment une suite. Pendant un an et demi, que ce soit à Los Angeles ou en Nouvelle-Zélande, j'y ai consacré tout mon temps et mon énergie. Cela ne m'était jamais arrivé !